Souvenirs d'enfance à Laghouat.

Publié le 1 Décembre 2013

 

 

 

Article du 08/01/2013.

Récit de Omar Marfoua écriture H'med B.

 

 

 

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Depuis quelques temps des souvenirs comme dans un rêve m'apparaissent sous forme de flashes.Et je me revois enfant courant dans l'avenue qu'on habitait et ou feu mon paternel rahimahou Allah avait son petit restaurant .L'avenue Marguerite que de souvenirs ,une animation particulière et des voisins exceptionnels.Je me laisse aller à ses songes et à cette douceur de mon lointain passé qui m'envahissait .Je me vois sortir de la maison de Benkarnou située à El gharbia ,mon champ de vision allait jusqu'au garage Benghayar.Je marchais joyeux et confiant ,j'étais dans mon territoire.Après quelques pas ,une grande ombre se projetait devant moi ,j'étais tétanisé et je savais qui c'était sans tourner la tête .Mon sixième sens était en éveil ,ce ne pouvait être que lui.Mais lui qui? Laid ,on l'appelait aussi "Ringuila" aller savoir pourquoi?J'avais une peur bleue de ce type comme tous les garçons de mon âge d'ailleurs .Le pauvre type était inoffensif mais on lui avait donné une réputation exagérée fruit de l'imaginaire des enfants.Il avait des jambes maigres et longues comme ceux des "saliganis" anciens tirailleurs de l'armée française et qui me faisaient peur.Je les craignais plus que les "lalijous" légionnaires qui fréquentaient le Bar en bas  de la pente juste à coté des Miliani.

J'allais rebrousser chemin vu ma grande peur de "Ringuila quand tout à coup j'aperçus mes deux héros du quartier.Je les nommais ainsi pour différentes raisons.Marzoug Boussalah rahimahou Allah et Laid Medjeled.Je considérais Marzoug comme un grand frère et j'avais gardé un grand souvenir de Sidi Habib (Allah yarehmou),celui qui un jour acheta le petit poussin  jaune mécanique de chez le marchand à jouets à Bakar mon frère aîné.Je le voulais tant pour moi ce jouet que j'en ai eu une crise de jalousie.Il m'offrit le même peut de temps après pour se rattraper;je me rappelle toujours de cela .Il me l'avait donné à sa descente du camion qu'il garait un peu plus bas dans le quartier.

Laid Medjeled c'était le garçon à la page,notre James Dean et lui se pliait à ce jeu;veston cuir,jean, gomina et brillantine (le gel d'autrefois) et la moto.Le bruit que faisait le moteur,l'odeur du mélange huile essence.Même aujourd'hui je n'arrive pas à me débarrasser de cette image à chaque fois que je le vois.La mode des années cinquante/soixante .Les jeunes étaient très BCBG  sans la TV ni Internet qui n'existait pas encore.Ils étaient aux top nos jeunes.Quelle époque!Mes deux copains je les considérais ainsi,même s'ils étaient adolescents et qu'ils me prenaient pour un bébé , je n'avais que six ou sept ans.Ils me rassuraient et je pouvais continuer mon chemin .Je croisais souvent Bouhafes le scout ,un jeune que mon père appréciait pour sa bonne conduite et son dévouement.J'avançais toujours mais juste avant de tourner à droite de l'avenue;je jetais un coup d'oeil furtif du coté du Bar ,au cas ou un "lalijou" ivre était éjecté brusquement dans la rue.J'en savais quelque chose puisque j'avais été témoin par le passé de scènes de carambolage devant ces lieux.Je faisais toujours attention en passant à cet endroit pour ne pas avoir de surprises.

Mes songes continuaient,je continuais à rêver presque éveillé.Je ne voulais surtout pas que ce bien être abandonnait mon esprit .L'imâge se brouillait,j'étais  placette(Dehina)et j'entamais l'avenue Marguerite .Sur la droite,je voyais le tailleur dont je n'arrivais plus à me rappeler le nom ni à me souvenir du visâge.Devant le magasin Dehina que j'évitais parce qu'il y avait toujours des vieux assis là;ils portaient de beaux habits traditionnels avec un grand"ganar" sur la tête.ILs inspiraient et forçaient le respect.De ce coté aussi se garaient les voitures et derrière un personnâge insolite mais célèbre dans toute la ville gribouillait sur un papier les matricules des véhicules pour un soi-disant P V.C'était "El Finga" que je craignais aussi .Je passais devant le magasin Hadj Bouhafes Regue ,chose étrange je me rappelle à peine de Kouider qui a mon âge mais je connaissais mieux ses frères plus âgés Amira qui m'aimait bien et Mebarek.Ce dernier m'arrêtait souvent pour faire la causette ,il m'estimait beaucoup.Je fus témoin un certain jour de décembre d'un événement terrible qui avait marqué ma mémoire;c'était ce jour ou la jeep de l'armée française ramenait le corps sans vie du Chahid Abbas rahimahou Allah tombé sous les balles assassines d'un harki.Mebarek adolescent criait et hurlait sa douleur et sa colère ;c'était terrible pour le gosse que j'étais et qui ne comprenait rien à tout ça.Heureusement que ce fameux jour ,j'étais en compagnie de mon oncle Sidi Hamad qui m'avait consolé et rassuré.

 

 

On ne passait pas par Bouameur sans faire un tour à l'intérieur et voir le nouvel arrivage d'illustrés et de bandes dessinées et à l'instar de mon ami H'med B ,j'entrais et regardais pour aller annoncer la nouvelle à mon oncle Bachir.Le seul qui pouvait se permettre de les acheter ,moi je devais attendre mon tour pour les lire car j'étais le plus jeune dans la liste des Marfoua.De chez Bouameur je traversais l'avenue pour aller en face là l'autre magasin des cousins Regue.Ceux là ,habitaient Ksar Bezaim le fief de ma grande famille.Il étaient les propriétaires d'un grand jardin mais surtout de la fameuse piscine du même nom et lieu culte pour la jeunesse de Laghouat en été.

Derrière le comptoir Si Allel vendait de la DDT(insecticide standard de l'époque)et bien sur il y avait d'autres produits de la chaux du plâtre,du confre etc...Mais le plus frappant c'était l'odeur entremêlée qui se dégageait de l'intérieur ;une odeur qui personnifie ce magasin.Un autre Régue s'invita dans mes songes en passant à cet endroit;Farid  que j'avais vu pour la dernière fois ici même avant qu'il ne quittât la ville à jamais.Sacré Farid ,le plus beau gosse de tous les Regue dans mon souvenir.

En trottinant dans les arcades ,je passais devant le magasin ou l'on vendait de la laine teinte à toutes les coule ures et ou une certaine odeur de souffre polluait l'atmosphère (le souffre était utilisé comme fixateur à l'époque).Je me demandais souvent ,pourquoi ma mère dressait parfois son fameux tepee à l'indienne dans la " houdjra"qui commençait à puer le souffre peut de temps après.Un autre souvenir qui n'avait pas disparu de mes songes.

Devant le magasin Chaiba,j'eu une pensée pour le fils aîné de ce commerçant notable,disparu dans le désert après une panne de camion.Allah yarhemou.

Je passais la rue de Si Lajdel(Jouane pour les clients)et là ,j'étais dans mon élément,mes arcades,mon fief à moi.Garig (Bedj Benyoucef)le restaurateur me prenait dans ses bras et m'enlaçait tout en me soulevant comme un petit sac de patates et cela devant ses propres enfants qui étaient un peu jaloux de l'affection de leur papa pour moi.Hacene et Noureddine me lançaient un coup d'oeil envieux.Tout ce tumulte et ce brouhaha attira l'attention de mon père qui sortait de son restaurant juste à coté en me lançant son cris de guerre"Omar j'en ai marre" c'était sa façon à lui de me montrer qu'il était content de me voir.Et se faisant l'écho de mon père Lahcene Djaballah répétait les mêmes paroles"Omar j'en ai marre" sous le regard innocent et amusé de ami Mabrouk le cycliste qui vaquait à sa besogne dans son petit magasin juste à coté.C'était l'oncle paternel de mon père.

Cette visite tardive en fin d'après-midi coïncidait avec les premières fournées de brochettes de Sidi (c'était ainsi que j'appelais mon père).Sidi qui était du genre bon vivant criait à ses clients "EL hachawa ahchat wa el kerch khewat" et profitant de ma présence à ses cotés ;il me chargea de livrer la commande du Bar Marguerite en face.La raison était toute simple ,les pourboires à un gosse étaient de plus en plus généreux;c'était une question de marketing.C'était mes premières leçons de marketing apprises avenue Marguerite et non pas dans une université britannique.

 

Plus loin dans les arcades, le magasin de confection Si Keciba et celui de mon oncle Sidi hamad et son fils Hamid transformé en magasin pilote pour la vente de denrées alimentaires juste après l'indépendance.Le souvenir de beaucoup d'anecdotes commençait à surgir de mes songes que je préfère arrêter ici pour ce délai.La suite c'est une autre histoire.

Rédigé par HMED B.

Publié dans #Art et culture.

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H
Bonsoir Si El Hadj!Merci venant de vous ce compliment m'honore ainsi que mon vieil ami du bord de la Tamise.
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M
très beau récit des souvenirs d'enfance tels que vécus par les enfants de notre génération et celle qui l'a précédée et succedée . Très beau style , bravo H'med , bravo Omar . Vous avez été<br /> sublissimo
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