La passion chez les immigrés pour l'équipe nationale.

Publié le 11 Janvier 2017

La passion chez les immigrés pour l'équipe nationale.

 

De Rachid Abbad .(journaliste à Liberté).

Ce n’est un secret pour personne que les sorties de l’équipe nationale, ces dernières années, suscitent un engouement particulier tant chez les nationaux que chez les expatriés. Les deux qualifications successives aux Coupes du monde 2010 et 2014 ont rallumé cette flamme chez nos “émigrés” qui s’identifient pleinement aux Verts, devenus avec le temps leur fierté. Liberté s’est rendu dans le fief des Algériens à Paris, là où tout le monde se donne rendez-vous pour parler du pays, des affaires et de l’équipe nationale. Le quartier de Barbès-Rochechouart, sis au 18e arrondissement, grouille de monde en cette glaciale journée de samedi où chacun y va de son occupation pour subvenir à ses besoins.Nous avons repéré quelques Algériens regroupés dans un coin, sirotant un café, des gobelets à la main, exactement comme ici. Ils étaient surpris et heureux à la fois de croiser un journaliste venu du bled afin de lui raconter leur cauchemar et les éternels problèmes qu’ils endurent depuis quelques années.Axant l’essentiel de notre débat sur l’équipe nationale afin d’éviter l’amalgame lié au social, nous avons d’emblée été interpellés par Zoheir T. de la ville d’Amizour, un fervent supporter de la JSK, qui nous dira qu’il est malade de voir son club souffrir en championnat. “Je n’arrive toujours pas à croire que ma JSK n’a pas encore sorti la tête de l’eau ! Où est le problème ? Pourquoi on ne gagne plus? Ce n’est pas normal que ce prestigieux club soit à cette position ; en l’Algérie, tout le monde sait que l’argent a sali le football, la JSK est justement victime de ce complot d’argent”, nous dira-t-il amèrement.Et d’enchaîner à propos des Verts : “Heureusement que notre équipe nationale nous fait oublier les déceptions de la JSK, ces derniers temps, même cette équipe nationale ne marche plus comme avant. C’est comme si elle était frappée par le mauvais sort. Les performances réalisées par cette équipe nous ont fait oublier le mal du pays et les problèmes qu’on rencontre ici à Paris. Les deux derniers matchs contre le Cameroun et le Nigeria nous ont laissé un gout d’inachevé.On n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi ce net recul? Toutefois, on garde espoir pour se qualifier au Mondial russe, il reste encore des matchs à jouer, on a une pleine confiance en cette équipe qui reste notre fierté ici devant nos voisins marocains et tunisiens. Il va falloir que Georges Leekens aille chercher cette Coupe d’Afrique pour nous donner de l’espoir, on est capable de ramener le trophée ». Son ami Omar B. de Boumedres n’est, toutefois, pas de cet avis :

“On n’a pas confiance en Leekens”
“Je ne suis pas d’accord avec toi, le président Raouraoua a mis tous les gros moyens à la disposition de cette équipe, moi je blâme les joueurs qui ont failli à leur mission, ils n’avaient qu’à battre le Cameroun à Blida, pour ne pas compromettre leurs chances. Je sais que le Nigeria et le Cameroun vont comploter contre nous, si on avait gagné chez nous, on ne serait pas là à faire des calculs, mais les joueurs n’ont plus la tête dans cette équipe, ils sont trop choyés, voilà pourquoi on a compromis nos chances de qualification. Même cet entraîneur, le Belge, ne m’inspire pas confiance, j’ai peur pour notre équipe nationale”. Nous quittons ce groupe pour aller déambuler sur le grand boulevard de Barbès, là où les Africains ont le monopole des téléphones portables cédés à des prix qui défient toute concurrence. Mamadou Touré, un Malien qui gère un magasin nous a reconnus, il nous a invité le temps de parler football. “J’avais supporté l’Algérie en Coupe du monde, elle a fait honneur à l’Afrique avec cette grosse performance au Brésil où elle avait les moyens d’aller encore loin, aujourd’hui, cette équipe a enregistré un très net recul, elle n’est plus la même. Vos joueurs ont eu trop d’argent, ils sont devenus riches, ils ne jouent plus pour les couleurs voilà pourquoi vous n’irez pas au Mondial Russe car le Cameroun et le Nigeria sont mieux que vous, c’est une génération finie, Mahrez ne pourra rien faire tout seul, Brahimi a perdu de sa superbe, l’Algérie ne fera rien à la CAN 2017”. Nous quittâmes ce magasin dont le discours du propriétaire est clair, pour continuer notre ronde. Juste à côté de la gare du métro, des Algériens avec un accent de l’Est, écoulent des paquets de Marlboro à 3 euros l’unité. Dès qu’on s’est approché d’eux, ils avaient paniqué croyant avoir affaire à des flics, avant d’être plus rassurés lorsqu’on leur a décliné notre identité

“On réclame la coupe d’Afrique de 2017”
“Moi, je suis de Guelma, la ville de l’Escadron noir qui a marqué l’histoire du football algérien avant de disparaître car il n’y a plus d’hommes compétents chez nous. Pour revenir à cette équipe nationale, je dirai tout simplement qu’elle nous a déçu, on ne comprend pas pourquoi Raouraoua change d’entraîneurs comme de chemise, il a déstabilisé cette équipe. Personnellement, je n’aimais pas trop ce Gourcuff, mais il fallait le laisser poursuivre sa mission, il a fait du bon boulot. Ne dit-on pas que les succès sont tributaires de la stabilité de l’encadrement technique ? Donc je fais porter l’entière responsabilité à Raouraoua qui a déstabilisé cette équipe nationale, qu’il assume les conséquences de son immixtion. Il doit nous ramener cette Coupe d’Afrique pour qu’on retrouve un peu notre autorité sur le football africain” concède Abdelkader M., 27 ans. Son ami Redounane L., de Skikda en veut à Leekens. “Je connais très bien le football belge, notamment cet entraîneur, je sais que Leekens ne ramènera rien à l’équipe nationale, il est très limité, je suis très pessimiste avec cet entraîneur. Je me demande pourquoi Raouraoua avec tout l’argent qu’il a dans les caisses, n’a pas ramené un entraîneur de renom. L’Algérie est devenue est une très grande équipe, il lui faut impérativement un entraîneur de renom, lorsque tu as des joueurs comme Mahrez, Slimani, Feghouli, Brahimi, Ghoulam, qui jouent tous dans des grands clubs, tu dois leur ramener un grand entraîneur, c’est évident !” nous dira ce jeune qui attend d’être régularisé pour pouvoir travailler légalement. D’autres Algériens se sont joints à nous pour se confier et nous raconter leurs problèmes.
On a pris congé d’eux pour emprunter le métro puis le RER C afin de rallier Saint-Geneviève des Bois pour rencontrer d’autres Algériens eux aussi fervents supporters des Verts. Parmi eux, Houari Arroussi, un jeune qui ne rate aucune sortie de l’équipe nationale. “En dépit des contre-performances contre le Cameroun et le Nigeria, je reste très optimiste sur le parcours restant de notre équipe. Je suis persuadé et convaincu qu’on peut se rattraper et arracher notre billet qualificatif au Mondial russe, il faut juste laisser tranquille cette équipe et ne pas la perturber” estime-t-il. D’autres Algériens nous assurent, du reste, que les Français appréhendent beaucoup les sorties des Verts, notamment dans les cités de la banlieue vu que souvent des escarmouches éclatent entre les Algériens et les CRS. “Parfois, la liesse se transforme en émeute” nous révèle Saïd K.
Nos émigrés attendent impatiemment la CAN 2017 pour avoir une idée sur le nouvel état d’esprit de l’équipe et veulent tous que cette génération douée offre le trophée à l’Algérie “Qu’ils nous ramènent ce trophée qu’on attend depuis 1990 !” conclut Jeloul J., de Mostaganem.

La passion chez les immigrés pour l'équipe nationale.
La passion chez les immigrés pour l'équipe nationale.

Rédigé par HMED B.

Publié dans #sport

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